
AUDIENCE DE RÈGLEMENT TENUE EN VERTU DE L’ARTICLE 24.4 DU STATUT NO 1 DE L’ASSOCIATION CANADIENNE DES COURTIERS DE FONDS MUTUELS
Re Teagan Laine Kliever
Motifs de la décision
Jury d'audition du conseil régional des Prairies:
- Richard Yaffe, K.C., Président
- Birju Shah, Membre représentant le secteur
- Greg Wiebe, Membre représentant le secteur
Appearances:
Audrey Smith, Avocate de la mise en application pour l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels
David Swayze, Avocat de l’intimée
Teagan Laine Kliever, Intimée
I. LE CONTEXTE ET LES CONTRAVENTIONS
- Par un avis d’audience de règlement daté du 3 août 2021, un jury d’audience (le jury d’audience) du conseil régional des Prairies de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (l’ACFM) a été convoqué par WebEx le 30 septembre 2021 pour déterminer si, conformément à l’article 24.4 du Statut no1 de l’ACFM, il devait accepter l’entente de règlement (l’entente de règlement) conclue le 30 juillet 2021 entre le personnel de l’ACFM et Teagan Laine Kliever (l’intimée) relativement à des questions pour lesquelles l’intimée pouvait être sanctionnée à titre de personne autorisée en vertu de l’article 24.1.1 du Statut no 1 de l’ACFM.
- L’entente de règlement concerne les allégations suivantes :
- du 10 avril au 16 octobre 2018, l’intimée a obtenu et eu en sa possession 7 formulaires de compte présignés relativement à 5 clients et, dans certains cas, elle a utilisé ces formulaires pour exécuter des opérations, en contravention à la Règle 2.1.1 de l’ACFM;
- du 21 février 2018 au 28 février 2019, l’intimée a modifié et utilisé, pour exécuter des opérations, 26 formulaires de compte relatifs à 22 clients, en modifiant des renseignements dans ces formulaires sans avoir demandé aux clients de parapher les modifications, en contravention à la Règle 2.1.1 de l’ACFM;
II. LES FAITS
- L’intimée est inscrite dans la province du Manitoba depuis avril 2015 dans le secteur des valeurs mobilières.
- Depuis le 5 juin 2017, l’intimée est inscrite au Manitoba à titre de représentante de courtier à Investia Services financiers inc. (Investia), membre de l’ACFM.
- Durant la période des faits reprochés, l’intimée exerçait ses activités dans la région de Souris, au Manitoba.
- Durant la période des faits reprochés, les politiques et procédures d’Investia ne permettaient pas aux personnes autorisées d’obtenir, de posséder ou d’utiliser des formulaires de compte présignés ni de modifier les formulaires de compte après que les clients les avaient signés.
- Entre le 10 avril et le 16 octobre 2018, l’intimée a obtenu et eu en sa possession 7 formulaires de compte présignés relativement à 5 clients et, dans certains cas, a utilisé ces formulaires pour effectuer des opérations.
- Les formulaires de comptes présignés comprenaient deux formulaires de transfert, trois formulaires d’ouverture de compte, un formulaire d’instructions systématiques et un formulaire d’instructions concernant les ordres.
- Du 21 février 2018 au 28 février 2019, l’intimée a modifié et utilisé, pour exécuter des opérations, 26 formulaires de compte relatifs à 22 clients, en modifiant des renseignements dans ces formulaires sans avoir demandé aux clients de parapher les modifications.
- Les formulaires de comptes modifiés comprenaient cinq formulaires de mise à jour des renseignements sur le client, cinq formulaires d’ouverture de compte, cinq formulaires de transfert, trois formulaires d’instructions concernant les ordres, un formulaire de changement de représentant de courtier, un formulaire relatif à la conversion automatique de parts sans frais et six formulaires d’instructions systématiques.
- Les modifications apportées aux comptes concernaient les objectifs de placement des clients, le type de régime, la valeur nette, la tolérance au risque et le code de fonds.
- Investia a découvert certaines des contraventions de l’intimée lors d’un examen en succursale. La société en a découvert d’autres en réalisant un examen complet des comptes de clients de l’intimée. Aucune préoccupation n’a été soulevée lorsqu’Investia a communiqué avec les clients de l’intimée.
- Le 6 septembre 2019, Investia a envoyé à tous les clients de l’intimée une lettre accompagnée d’un historique des opérations sur trois ans pour chacun d’entre eux. En ce qui concerne les formulaires présignés ou modifiés qu’Investia a découverts et qui contenaient des renseignements sur la connaissance du client, Investia a envoyé aux clients une copie de ces renseignements figurant au dossier et leur a demandé de s’assurer que l’information était exacte. En ce qui concerne les autres types de formulaires de compte présignés ou modifiés, Investia a demandé aux clients de vérifier l’exactitude de l’historique de leurs opérations et de communiquer avec elle en cas d’irrégularité. Aucun client n’a signalé de problème en réponse aux lettres.
- Le 1eraoût 2019, Investia a soumis l’intimée à une surveillance stricte. Lors de cette période, l’intimée a versé à Investia une somme totale de 992 $ composée de frais d’administration et de frais pour les lettres envoyées aux clients.
- Le 8 août 2019, l’intimée a signé une lettre d’engagement dans laquelle elle acceptait de se conformer aux politiques et procédures d’Investia à l’avenir. Le 20 décembre 2019, Investia a terminé sa surveillance stricte de l’intimée et lui a transmis une lettre de mise en garde concernant les formulaires de compte présignés et modifiés.
III. L’ANALYSE
- Il n’y a aucune preuve attestant que l’intimée a tiré un avantage financier de la conduite décrite précédemment, à part les commissions et honoraires qu’elle aurait normalement eu le droit de toucher si les opérations avaient été exécutées correctement.
- Rien n’indique que des clients ont subi des pertes ou déposé des plaintes, ou que des autorisations n’ont pas été obtenues.
- L’intimée n’avait jamais été visée par une instance disciplinaire de l’ACFM auparavant.
- L’intimée a coopéré avec le personnel de l’ACFM tout au long de l’enquête et de l’instance et elle a reconnu la véracité des allégations.
- En reconnaissant les faits et les contraventions susmentionnés, l’intimée a épargné à l’ACFM le temps et les ressources qu’aurait exigés la tenue d’une audience complète sur les allégations.
- Les facteurs atténuants en l’espèce sont que l’intimée n’a pas de dossier disciplinaire, qu’il n’y a pas eu de plaintes de clients et que rien n’indique que des clients ont subi un préjudice ou une perte. En outre, l’intimée semble comprendre la gravité de ses actes et a assumé la responsabilité de ces derniers.
- Des jurys d’audience de l’ACFM qui devaient déterminer s’il convenait d’accepter une entente de règlement [1]proposée ont tenu compte des facteurs énoncés ci-après dans leur décision. En effet, les jurys d’audience conviennent que ces facteurs demeurent pertinents en tant que lignes directrices pour prendre une telle décision :
- l’acceptation de l’entente de règlement est-elle dans l’intérêt public, et les sanctions imposées protégeront-elles les investisseurs?
- l’entente de règlement est-elle raisonnable et proportionnée, compte tenu de la conduite de l’intimée qui y est exposée?
- L’entente de règlement aura-t-elle un effet de dissuasion spécifique et générale satisfaisant sur l’intimée et le secteur, respectivement?
- le règlement proposé contribuera-t-il à prévenir à l’avenir le type de conduite décrit dans l’entente de règlement?
- l’entente de règlement favorise-t-elle la confiance dans l’intégrité des marchés financiers canadiens?
- l’entente de règlement favorise-t-elle la confiance dans l’intégrité de l’ACFM?
- l’entente de règlement favorise-t-elle la confiance dans le processus réglementaire?
- L’ACFM considère la protection des investisseurs comme étant l’objectif premier de la réglementation des valeurs mobilières. La réglementation doit aussi favoriser la confiance du public dans les marchés financiers et le secteur des valeurs mobilières[2].
- Les sanctions imposées doivent être suffisantes pour assurer la confiance du public dans la réglementation du secteur de l’épargne collective et avoir un effet de dissuasion.
- Il existe un certain nombre de principes généraux applicables à l’imposition d’une sanction, principes qui ont été présentés et que le jury a pris en compte.
- L’avocate de l’ACFM a aussi passé en revue avec le jury diverses décisions de l’ACFM et les sanctions imposées dans ces décisions.
- Lorsque le jury d’audience a demandé à l’avocat de l’intimée si celle-ci avait quelque chose à ajouter, il a indiqué de nouveau que lui et l’intimée étaient d’avis que les sanctions imposées dans l’entente de règlement étaient appropriées. L’avocat de l’intimée a indiqué que cette dernière avait assisté à l’audience afin d’assumer la responsabilité de ses actes,qu’elle ne contestait pas les faits et qu’elle souhaitait affirmer auprès du jury d’audience que ces contraventions ne se reproduiraient pas.
- Le jury peut accepter ou refuser l’entente de règlement recommandée (article 24.4.3 du Statut no1 de L’ACFM). Il est couramment admis que le jury d’audience ne doit pas s’ingérer à la légère dans un règlement négocié.
IV. LES MODALITÉS DE RÈGLEMENT
- Au terme de l’audience, le jury a approuvé l’entente de règlement conclue entre les parties, entente qui prévoit notamment ce qui suit :
- l’intimée doit payer une amende de 14 500 $ en vertu de l’alinéa 24.1.1 b) du Statut no1 de l’ACFM;
- l’intimée doit payer une somme de 2 500 $ au titre des frais, en vertu de l’article 24.2 du Statut no1 de l’ACFM;
- L’intimée devra se conformer à la Règle 2.1.1 de l’ACFM à l’avenir;
- si, à quelque moment que ce soit, une personne qui n’est pas partie à la présente instance, à l’exception des entités énoncées à l’article 23 du Statut no1 de l’ACFM, demande dans le cadre de l’instance la production de pièces ou l’accès à des pièces qui contiennent des renseignements personnels au sens de la politique sur la confidentialité de l’ACFM, le secrétaire général de l’ACFM ne fournira pas de copies des pièces demandées ou n’y donnera pas accès sans avoir préalablement caviardé tous les renseignements personnels, conformément aux paragraphes 1.8 2) et 5) des Règles de procédure de l’ACFM.
- Nous sommes convaincus que les sanctions convenues sont raisonnables et que l’entente de règlement est dans l’intérêt public, et nous convenons à l’unanimité que l’entente de règlement devrait être acceptée.
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Richard Yaffe, K.C.Richard Yaffe, K.C.Président
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Birju ShahBirju ShahMembre représentant le secteur
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Greg WiebeGreg WiebeMembre représentant le secteur
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